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Contributors explore a wide variety of dramatic texts ranging chronologically from the fifteenth century to the seventeenth, illustrating how the concept of ideology may be applied to several domains: politics, of course, but also religion and relations between the sexes. The conditions and functions of the differing sorts of theatre involved are also taken into account, and particular attention is given to the circuit of ideological transmission established between spectators and spectacle as essential to the process of representation.
John J. McGavin
To See or Not to See: Ideology and Spectatorship
Prenant tout particulièrement appui sur les sources civiques et religieuses concernant le début de l’ère moderne en Écosse, l’article explore les liens qu’entretiennent l’idéologie, la mémoire et la honte dans la discipline du regard spectateur. Ceci revient finalement à lier l’exercice du regard au contexte social de la Réforme calviniste en Écosse, ce contexte valorisant paradoxalement les signes extérieurs des conduites, tenus, dans l'idéologie en place, pour indispensables substituts probatoires de la qualité spirituelle de chaque individu.
André Lascombes
The Croxton Play of the Sacrament: Paradox and Scandal Made Spectacle
Revenant sur une évaluation antérieure (2000) de la même pièce, cet article tente de montrer en quoi son architecture argumentative, née de la conjugaison de deux actes de délinquance dogmatique, et plaçant paradoxalement le héros juif en position de déclencheur de la conversion, unit intimement son discours démonstratif aux éléments constitutifs du spectacle. D'où une force qui se nourrit tout ensemble de spectaculaire et de conviction logique.
Yvonne Phoenix
A Daring Game: The Handling of Political Issues by Tudor Playwrights
L’article veut seulement souligner l’importance des risques que l’on pouvait prendre pendant la période la plus incertaine de l’ère Tudor en écrivant et en jouant des pièces susceptibles d’offrir le moindre soupçon d’idéologie politico-religieuse. Il examine les interactions de la censure et de la caution sur l’activité dramatique, au long du règne des différents princes Tudor, pour montrer comment ces deux attitudes pouvaient alternativement encourager ou restreindre l’activité des dramaturges et des troupes. Pour l’essentiel toutefois, l’article présente la théorie selon laquelle différentes techniques de mise en scène furent déployées avec succès pour répondre aux dangers que les dramaturges devaient chercher à contourner.
Roberta Mullini
“For eche of you one tale shall tell”: Religion, Debate and Spectacle in John Heywood’s The Foure PP
La première partie de l’article examine la relation qu’entretient la pièce de Heywood avec le Dialogue sur les hérésies de Thomas More, soulignant la similitude d’attitude des deux auteurs quant au rôle de la réforme des abus menée depuis l’intérieur même de l’Église catholique. La deuxième partie traite du rôle que tiennent dans la pièce le verbe et l’action scénique, examinant les deux récits, assez longs, de l’Apothicaire et du Pardonneur (ou Marchand d’indulgences), afin de montrer la vertu théâtrale qu’ils ont malgré leur statisme apparent. Dans ces deux contes, les positions idéologiques parviennent au spectateur par l’intermédiaire des personnages qui les incarnent et du débat qu’animent ces derniers.
Greg Walker
Early Tudor Drama and the Arts of Resistance
L’essai examine le théâtre des interludes joués sous Henry VIII, à la lumière des travaux d’anthropologie politique de James C. Scott. Les modèles que Scott nomme « réaction occultée » et « formes de résistance quotidienne », et dont il explore les traits dans deux ouvrages, peuvent peut-être aider à comprendre les fonctions politiques de l’écriture et de la représentation dramatiques de notre période. L’essai cherche à définir dans quelle mesure le modèle de conduite politique de Scott (initialement pensé pour rendre compte de la façon dont des groupes apparemment dénués de pouvoir, au sein de sociétés agraires contemporaines, se mettent à résister à l’autorité politique, mais qui a depuis connu des applications plus générales) s’accorde aux conditions idéologiques et pratiques prévalant dans la société du premier âge Tudor, et plus précisément durant la période de la tyrannie henricienne, qui fait suite au divorce du roi et à la rupture avec Rome dans les années 1530.
Sarah Carpenter
Dramatising Ideology: Monarch, State and People in Respublica and Ane Satyre of the Thrie Estaitis
Les deux pièces, jouées en 1553-54, que sont, pour l'Angleterre, Respublica, et pour l'Ecosse, la pièce de Lyndsay, Une satire des trois états, présentent d'étroites ressemblances. L'une comme l'autre marquent l'accession au trône de princesses de religion catholique, dramatisent sur le mode allégorique la façon dont un gouvernement mal géré est soumis à l'oppression hypocrite de forces politiques maléfiques, traitent de problèmes politiques urgents, et mettent en scène des personnages représentant la Monarchie, l'État et le Peuple. Pourtant, en représentation, les deux pièces expriment des idéologies extrêmement différentes de la monarchie et de la nation, proposant des conceptions différentes du Prince, du Sujet, et des relations qu'ils entretiennent. L'article veut montrer comment une même forme, celle du drame, familière à tous, met en scène des conceptions différentes de la nation, et du gouvernement dans les deux pays.
Richard Hillman
“No debate, please, we’re British”: Circumventing and Reinventing Politics on the Early English Stage
Partant des représentations médiévales, en France et en Angleterre, des procès de paradis, débats entre Justice et Miséricorde, l’article retrace l’écart qui s’ouvre au long du seizième siècle entre la représentation que le théâtre des deux pays donne des débats formels sur les problèmes politiques, et la suite pratique qu’ont, ou n’ont pas, ces débats dans la réalité des choses. D’un côté, la tragédie française traite de la tyrannie et met le plus communément du monde au centre du débat le conflit clémence / rigueur, tandis que, d’autre part, le théâtre anglais évite de débattre ouvertement de cette question ou d’autres tout aussi sensibles. Mais, à l’inverse, ces débats menés sur la scène française tendent à masquer l’orthodoxie de la pensée et une soumission passive, alors qu’il est possible de montrer que les réticences et tergiversations observées sur la scène anglaise accompagnent l’éclosion de formes de commentaire politique moins virulentes mais potentiellement plus subversives.
Andrew J. Power
Gorboduc, Early Elizabethan Seneca and the Religious Settlement
À partir de l’attaque dirigée contre elle qu’Élisabeth prétend trouver dans la représentation en 1561 du Gorboduc de Thomas Sackville et Thomas Norton, l’article cherche à explorer, dans la perspective du débat religieux, ce que la tradition sénéquéenne met en place, dès les premières années du règne, en termes de représentation, de traduction et d’imitation. L’accent tout particulier mis sur la légende d’Œdipe incite à réexaminer la controverse qui s’engage sur la succession d’Élisabeth, ainsi que les liens qu’elle a avec la restauration de la lignée royale plusieurs fois évoquée (réclamée ?) par Henry VIII pour des raisons personnelles plutôt sordides, mais qui touche aussi à de graves problèmes religieux.
Bob Godfrey
Offence and Appeal: A Marlowe Paradox?
Les idées que Marlowe met en théâtre ont toujours paru mettre en cause les positions idéologiques que l’on sait liées à la culture dominante. Cest tout aussi vrai qu’il s’agisse de ce que l’on considère comme une pièce de ses débuts, Didon, Reine de Carthage, ou la pièce plus largement connue qu’est la Tragique Histoire du Docteur Faust, dans ses différentes versions.
L’article présente des lectures de ces pièces montrant comment Marlowe sait adapter ses sources narratives à la scène, et comment il soumet à ses auditoires différentes façons de considérer la religion, les relations interpersonnelles, l’autorité du Prince, ainsi que les sentiments profonds d’un être affronté à sa propre dissolution.
Jean-Christophe Mayer
Shakespeare’s Memorial Drama: History, Memory and the Re-rehearsing of Ideology on the Shakespearean Stage
Cet article examine la façon dont l’histoire est transformée en mémoire sur la scène shakespearienne. Il se penche sur un ensemble de pièces particulièrement significatives à cet égard (Henry V, Jules César, Hamlet, Antoine et Cléopâtre, Cymbelin). En effet, le théâtre de Shakespeare peut être considéré comme une véritable « machine mémorielle », pour emprunter la terminologie de Marvin Carlson : le drame shakespearien recycle la mémoire, est hanté par le souvenir des spectres du passé, et fait jaillir le passé dans le présent afin d’y accomplir son rôle critique, au nom de la communauté.
Armelle Sabatier
The Representation of Conflicting Ideologies of Power in Some Jacobean Roman Plays
La figure de Jules César constitue, pour le théâtre élisabéthain et jacobéen, un moyen détourné de s’interroger sur le pouvoir politique et les conflits qu’il peut générer. Trois pièces de cette période consacrées à ce personnage historique s’interrogent sur les rouages de la vie politique romaine ainsi que sur la lutte acharnée et sanglante des idéologies de cette époque. Dans le sillage du Julius Caesar de Shakespeare (1599) qui se concentre, entre autres, sur l’assassinat de César par les conspirateurs, deux dramaturges jacobéens offrent d’autres perspectives sur le conflit entre les diverses idéologies. The Tragedie of Caesar and Pompey (1607), d’un auteur anonyme, se structure autour de la rivalité entre César et Pompée et se clôt sur l’assassinat de César. Le Caesar and Pompey de George Chapman (publié en 1631) se penche exclusivement sur la lutte des deux personnages éponymes. Au travers de la représentation de la vie et de la mort de Jules César, ces trois pièces révèlent un rejet de tout pouvoir excessif et de l’idolâtrie politique, deux éléments constitutifs du personnage historique et littéraire de César.
Pauline Ruberry-Blanc
The Older Woman on the Early Modern English Stage: Fixed Stereotype or Mobile Signifier?
L’article ambitionne d’étudier la question ci-après : dans quelle mesure le personnage stéréotypé de la vieille femme est-il mis en question dans le théâtre anglais de la première modernité, et à quel point ce stéréotype devient-il un signifiant qui évolue. Cette figure dramatique hérite des traits négatifs que lui transmet la culture patriarcale, traits souvent accusés jusqu’à la caricature. La plupart des représentants de ce type ne sont que faiblement individualisés et ont pour fonction essentielle de servir la progression dramatique. Un bref survol de la période révèle pourtant comment, malgré des différences évidentes, le drame de la période propose tout un assortiment de choix récurrents pour représenter la femme âgée. Les attitudes précédemment teintées de misogynie s’imprègnent de nouvelles évolutions sociologiques et religieuses, et l’ancien stéréotype mis en débat subit des transformations qui inspirent des personnages plus développés et vivants qui, à l’instar de leurs modèles de la vie réelle, jouent dans le drame des rôles plus décisifs.
Michael Hattaway
Something of Great Constancy: Representing and Reading Fairies on the Tudor Stage
Pouvons-nous savoir si Shakespeare et d’autres auteurs croyaient aux fées, ou ce qu’ils en pensaient ? La question se révèle insoluble, mais il est pourtant possible de déterminer comment les auteurs de la Renaissance et des Réformes les utilisaient pour explorer un grand nombre d’aspects de la vie d’alors et d’aujourd’hui encore. Le légendaire des fées faisait intrinsèquement partie des débats culturels engagés sur les rôles dévolus aux femmes, sur la sexualité des hommes et des femmes — tandis que les fées servent de repères matérialisant les contours de la vie domestique et des activités rurales. Dans Roméo et Juliette (voir le discours de Mercutio sur la reine des fées, ou Queen Mab, ainsi que dans le Songe d’une nuit d’été, il se peut que les fées servent à transcrire des états psychiques et à incarner des forces dynamisant le drame, plutôt qu’à représenter des forces surnaturelles.
Donald Beecher
The Art of Declining Invective in Ben Jonson’s Poetaster
L’invective, qui relève de la persuasion, appartient au domaine de la rhétorique. Certains humanistes de la Renaissance s’enthousiasmant pour la polémique intellectuelle, la poussent un cran plus loin, suivant les recommandations de Cicéron, en s’attaquant à l’intégrité de l’adversaire, en son être rationnel et moral, afin de discréditer ses idées. De quoi relevait exactement ce que l’on nomme la « guerre des théâtres » à la fin de la période élisabéthaine et au début de l’âge jacobéen demeure sujet de débats, qu’il se soit agi de conflits idéologiques, stylistiques ou personnels, ou encore que ça n’ait été qu’arguments mercantiles destinés à faire spectacle pour le chaland. Mais quand la guerre exacerba les attaques ad hominem parmi les dramaturges, ces auteurs se cherchèrent aussi modèles, attitudes et postures respectables capables de canaliser le vitriol. On peut prétendre que dans son Poetaster (mauvais poète, rimailleur), sa dernière participation à la bagarre, Ben Jonson a découvert le plus perfectionné des stratagèmes et l’auto-justification la meilleure pour défendre la véritable poésie contre ceux dont l’art décadent menaçait de porter atteinte à la gloire de l’heure élisabéthaine. Situant l’action dans la Rome ancienne et se drapant dans la vertueuse indignation horatienne, il pointe un index accusateur vers ses contemporains, que l’on identifie aisément comme les mauvais poètes de sa pièce. Pourtant, il comprit aussi que la mort que l’on décrète en paroles est à double sens, et que le geste de malédiction améliorerait peu sa propre image à l’étranger. Sa pièce ne donne donc pas seulement la mesure de la puissance de sa malédiction, mais elle montre aussi ses propres limites comme outil de défense de la culture d’une élite.